le Bayern et l’Allemagne, terre promise des jeunes Français



Il pourrait bien y avoir autant de Français des deux côtés de la pelouse du stade de Luz, dimanche 23 août, en finale de la Ligue des champions. Kingsley Coman est annoncé dans le onze de départ du Bayern Munich, face au Paris-Saint-Germain (PSG). Sur le banc du « Rekordmeister », quatre compatriotes pourraient même faire leur entrée en jeu pendant le match : Benjamin Pavard, Lucas Hernandez, Corentin Tolisso et Michael Cuisance.
Jamais aussi fournie, la colonie des « Franzosen » du Bayern – renforcée cet été par l’arrivée de l’ancien du PSG Tanguy Kouassi – ne fait pourtant plus exception dans le championnat allemand. Vingt-six Tricolores évoluaient en Bundesliga au cours de la saison 2019-2020, soit la deuxième nationalité étrangère la plus représentée, derrière l’Autriche (32 joueurs) et devant les Pays-Bas (21) et la Suisse (16).
Une déclinaison footballistique de l’amitié franco-allemande qui ne date pas d’hier, mais presque. S’ils étaient déjà trois Tricolores à jouer de l’autre côté du Rhin vingt ans en arrière, ce n’est qu’au cours des dernières saisons que les Français ont afflué – leur nombre passant de 6 à 26 en seulement cinq ans.
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« Etonnante maturité »
Terre d’accueil des pionniers de cette expatriation : le Bayern Munich. Depuis la fin des années 1990, Bixente Lizarazu, Willy Sagnol et Franck Ribéry ont écrit quelques belles pages de l’histoire du club. « Par leur mentalité et leur style de jeu, les joueurs français correspondent bien au Bayern, analysait en juillet Karl-Heinz Rummenigge, président du conseil d’administration du quintuple vainqueur de la Ligue des champions, dans un entretien à France Football. (…) Certes, ils ne sont pas donnés, mais le rapport qualité-prix reste intéressant. Nous les adorons et eux se sentent bien chez nous. »
Les Français, l’ancien attaquant les aime surtout jeunes, parfois à peine professionnels, lui l’admirateur de la formation hexagonale, « unique » : « Les joueurs sont très bien préparés physiquement, techniquement et tactiquement. Ces joueurs de 20 ans font déjà preuve d’une étonnante maturité dans leur jeu et leur personnalité. Ils constituent pour chaque club allemand un enrichissement. »
Débarqué en juillet du PSG qui l’intégrait pourtant déjà dans sa rotation de joueurs, Tanguy Kouassi n’est que le dernier d’une liste plus longue à chaque mercato de jeunes passant la frontière. Et le Bayern n’a plus le monopole de leurs talents. Leipzig (avec Dayot Upamecanon, Nordi Mukiele, Ibrahima Konaté, Christopher Nkunku), Mönchengladbach (Marcus Thuram, Alassane Pléa, Mamadou Doucouré), Stuttgart (Momo Cissé, Tanguy Coulibaly), Dortmund (Dan-Axel Zagadou) ou Leverkusen (Moussa Diaby) ont eux aussi misé sur des Français prometteurs, et pas toujours majeurs.
Les précieux retraités
Ancien défenseur professionnel des deux côtés du Rhin, aujourd’hui consultant pour la chaîne BeIN Sports, Patrick Guillou analyse l’attrait soudain pour la Bundesliga : « C’est devenu chic de venir jouer en Allemagne, comme dans les autres grands championnats européens. Il y a du public, des stades flambant neufs et un football très offensif. Certes, la caisse de résonance est encore moindre qu’en Espagne ou en Angleterre. Mais le foot y est attrayant et offre aussi la possibilité de taper à la porte de l’équipe de France. »
Et si l’exode est souvent couronné de succès, c’est en partie grâce au long travail de prospection réalisé par les clubs allemands, des années avant la signature d’un quelconque contrat.
« Aucun transfert n’est le fruit du hasard, poursuit Patrick Guillou. Des “scouts” vont partout dans les centres de formation ou les sélections de jeunes pour suivre des joueurs de 15-16 ans. Les clubs accumulent sur eux plein d’informations qui, quand elles sont confirmées par quelques bonnes prestations chez les pros, leur permettent de vite faire le choix. »
Le commentateur a eu vent de drôles d’observateurs au service des Allemands : « Allez voir un entraînement de jeunes et vous croiserez forcément des retraités présents là juste par passion pour le foot. Des clubs en contactent, car ce sont les plus fins connaisseurs du comportement et de la personnalité d’un joueur. Arrive-t-il en retard ? Est-il parfois de mauvaise humeur ? Ils sont les mieux placés pour le savoir. »
Le PSG contre ses anciens rejetons
Une mine d’informations forcément utiles au moment de convaincre un joueur de tout l’intérêt qu’on lui porte. Passé à l’été 2018 de Nice à Mönchengladbach, Alassane Pléa fut bluffé par la documentation accumulée à son sujet par son futur employeur.
« Ils ont sorti des analyses, des stats, a raconté l’attaquant à L’Equipe juste après son transfert. Ils avaient vu beaucoup, beaucoup de matchs depuis mes dix-huit ans ! [Il en avait sept de plus à la signature] C’est ce qui m’a plu. Ils ont pensé que j’étais le joueur parfait pour compléter leur attaque, car il leur manquait un profil comme le mien. » L’ancien du centre de formation de l’Olympique lyonnais a, depuis, honoré sa première cape avec l’équipe de France.
Dans sa quête de couronne européenne, le PSG constate à chaque étape lisboète la bonne intégration de ses anciens rejetons chez le voisin allemand. Après Christopher Nkunku en demi-finales, sous les couleurs de Leipzig, les Parisiens vont croiser Kingsley Coman sur la dernière marche menant à la C1. Mais que la bande à Neymar ne s’y trompe pas : l’ex-pépite du PSG ne fera pas de sentiments contre son premier amour, qu’il juge loin encore de son Bayern : « Ils ont fait un très beau parcours cette année, ils sont en finale et c’est mérité, mais je pense que c’est sur cinq ou dix ans que l’on juge vraiment un grand club. »